C'est peut-être parce que je suis dans un espèce de phase noire que je vois tout de la même couleur, mais cette histoire que je vais vous raconter et dont j'ai été témoin depuis le printemps, me remplit de désespoir.
Il était une fois une dame qui habitait dans le bloc voisin de chez nous. Cette dame, qui pourtant tenait une forme acceptable et affichait un visage qui aurait pu séduire un homme du même age, habitait seule dans son logement, peut-être échaudée par de mauvaises expériences amoureuses ou peut-être simplement effrayée d'affronter le monde. On devine que cette dame devait s'ennuyer effroyablement en sa demeure, son seul compagnon un poste de télévision qui ne cessait de parler mais qui hélas n'écoutait jamais.
Découragée de ne jamais rencontrer quelqu'un pour combler les espaces vides autour d'elle, elle décida un jour d'acheter un animal qui lui tiendrait compagnie. Elle était peut-être motivée par l'attrait que son nouveau compagnon aurait sur les passants dans la rue. N'était-elle pas elle-même irrésistiblement attirée vers ces gens qui gambadent avec en laisse une grosse boule de poils à la mine gentille? Ne désirait-elle pas s'approcher des gros toutous à la langue sortie, prête à lécher les doigts qui lui caresseraient derrière les oreilles? N'était-ce pas là une façon facile de se rapprocher, de briser la glace et de faire connaissance?
Mais voilà, elle n'aurait jamais eu le courage de s'élancer vers un inconnu de la sorte, animal ou pas. Alors le stratagème inverse fut envisagé: si je ne vais pas vers l'inconnu, se dit-elle, il faut attirer l'inconnu à moi. Le plan fut aussitôt mis en action et, parce qu'elle affectionnait particulièrement les petites bêtes, elle opta pour une race qui a fait la joie de tous dans le personnage de Milou, le petit terrier.
Or voilà que l'animal en question n'avait rien de sympathique. Plutôt que d'attirer le regard attendri des passants, il montrait les crocs, aboyait d'un air féroce, tirait sauvagement sur sa laisse, tout pour mettre sa maîtresse dans une situation pour le moins embarassante. Au début, celle-ci se fâchait contre lui, essayait de lui faire comprendre de ne pas user de ce comportement en public et lui criait incessamment un simple mot: non!. Tirant verticalement sur la laisse, elle le forçait à adopter une posture de bipède, le faisant cracher de colère de ne pouvoir inspirer pour aboyer de toutes ses forces.
Jour après jour, patiemment, elle continuait à lui montrer les bonnes manières, celles du chien de compagnie que tout le monde aime. Après tout, c'est un travail de patience.
Puis, probablement épuisée de n'avoir sur lui que l'effet d'un soupir dans une tempête de vent, elle abandonna l'idée de changer le comportement ce cet animal entêté. À la place, elle changea sa propre conduite car les humains ne sont-ils pas infiniment adaptables?
Cette décision prise, elle ne tira plus sur la laisse, elle ne parla plus à son animal à la manière d'une mère à son petit qui a mal fait, elle ne tenta plus de lui inculquer les notions de l'étiquette animale envers les humains.
Plus simplement, depuis ce jour, lorsqu'un passant se présente devant elle, elle traverse de l'autre côté de la rue, mettant de la distance entre le monstre qu'elle tient et la personne devant elle qui, sait-on jamais, est peut-être celui qui la sauverait de son ennui.
22 juin 2006
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